mercredi 30 décembre 2015

007 vu par les écrivains (2) : Roland Barthes and co


 

En décembre 1965, "Le Nouvel Observateur" s'intéresse à James Bond. "Devant un tel phénomène sociologique, nous avons demandé leur opinion à quelques spécialistes des faits humains et des mythes". 

Roland Barthes : "Il y a eu un temps où le héros de notre époque était un homme complet: sans cessé d'être le plus fort, il pensait, savait, il était celui qui voit clair ; c'est ce qu'on pouvait lire dans les rôles et le regard même de Gary Cooper ou de Humphrey Bogart. Bond, lui, n'a jamais l'air de penser et cependant il décide toujours ; il connaît des obstacles, non des résistances ou des fatigues ; il est non seulement invulnérable mais encore inusable et insalissable : c'est un bel objet qui manipule d'autres objets ; il est parfaitement homogène au monde de gadgets dans lequel il vit. Tout cela va cependant très bien dans la mesure où le bondisme se met en spectacle lui-même et comporte toujours un certain grain de parodie : à sa manière, James Bond est un héros distancé."

Jean Duvignaud : "Au cinéma, James Bond est une sorte de monstre : il cristallise assurément la force et représente, par là, un héros bien musclé qui évoque assez bien les beaux SS que d'aucuns trouvaient fascinants ; les femmes qu'il étreint, on aimerait savoir ce qu'elles éprouvent, car ce héros semble bien un monstre froid. Cela dit, on conçoit qu'il exerce une fascination négative - comme celle de Siegfried, un Siegfried libertin."

Georges Balandier : "Avec les aventures de James Bond, les mythologies modernes s'enrichissent d'un nouveau chapitre. On y raconte comment le héros maîtrise le temps et l'espace, comment il brise les manœuvres des organisations et des puissances avec les seuls moyens de l'individu. Reconnaissons-le sans trop jouer sur les mots. Ce personnage fait accomplir un bond en avant dans "l'imaginaire" des hommes du XXe siècle. Il joue le rôle de révélateur."

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